Page:Angellier - Robert Burns, II, 1893.djvu/341

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

- 317 -

rendu éloqiiemment quelques aspects. Il a fallu, pour fixer ces insaisis- sables nuances, la longue éducation du regard moderne, son sens des couleurs. Encore n'y arrive-t-on qu'imparfaitement '. Il est clair que Burns n'a pu rendre cette nature. Il l'avait du reste peu vue et seulement pendant son voyage fait avec le souvenir de Mary Campbell.

Mais il avait vécu, au bord de cette même mer, un peu plus bas, et si elle n'a pas, sur les côtes de l'Ayrshire, la poésie qu'elle prend sur les côtes de Skye, elle a cependant déjà sa grandeur. Avec ses vastes baies, ses «falaises abruptes, le vieux château de Greenan, le roc d'Ailsa Craig, et la masse puissante de l'île d'Arran, derrière laquelle se couche le soleil, elle a un caractère de rude vigueur fait pour émouvoir un poète. Cette mer-là, Burns la connaissait. Il avait été élevé devant elle, il avait erré maintes fois sur ces rivages. La Muse, dans La Vision^ lui dit :

Je l'ai vu chercher la grève retentissante, Charmé par les mugissements des houles 2.

Cependant cette fréquentation de la mer n'a pas laissé beaucoup de traces en lui. A peine si on rencontre, épars dans son œuvre à de grandes distances, quelques traits de paysage maritime. Ils sont rapides et sommaires ; ils montrent l'Océan de loin et surtout vers le soir. On est tenté de les rapporter aux heures où, après la journée de travail, le jeune paysan songeait devant la porte de Mount-Oliphant ou de Mossgiel, avec la mer lointaine sous les yeux. C'est ainsi qu'il a vu le « sombre sentier de la tempête passer sur le sein des vagues ^ », « le soir dorer la houle de l'océan * », et « la pâle lune se coucher derrière la blanche vague ^ ». Quand Clarinda s'embarqua pour les Indes, il retourna sur le rivage.

sur la grève solitaire, Tandis que les oiseaux de mer volent et crient autour de moi,

^ Sur ce pa3-sage des côtes ouest de l'Ecosse, voir les Recollections of a Tour in Scotland de DorothyWordsworth, Third Week. — On en trouvera quelques traits essentiels et choisis par Wordsworth, dans ses Memorials of a Tour in Scotland, 1803, The Blind Highland Boy, et dons son Yarroiv Hevisiled and Other Poems, en particulier dans la pièce Composed in the glen ofloch Etive. — Pour les renseignements géologiques, voirie lixre de Archibald Geikie : The Scenery of Scotland, viewed in connection with its Physical Geology, le chapitre m : The Sea and its work on the Scotlish Coast Line. — On trouvera de beaux paysages dans A Sunimer in Skye de Alexander Smith, et quelques jolies descriptions dans A Piincess of Thule de William Black. — Mais le livre qui a rendu les aspects et l'âme de cette mystérieuse côte, est le livre de Robert Buchanan : The Hcbrid Isles. 11 y a des pages absolument admirables et écriles par un grand poète. C'est l'ouvrage qu'il faut lire là-bas. Nous lui devons d'avoir profondément ressenti cette contrée, et nous lui gardons la reconnaissance que nous devons aux esprits qui nous ont ainsi fait un présent.

2 The Vision.

3 Lament written al a Time when the Poel was about to leave Scotland. i Smiling Spring corne' s in rejoicing.

s Oh, open the Door.