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populaires surtoiil, qui généralement expriment un sentiment simple. Sauf l'orthographe, une chanson d'amour du xvi*' siècle peut ser\ ir à un amoureux d'aujourd'hui. Avec sa vigueur de pensée qui faisait toujours porter sa poésie sur la suhstance des choses, Wordsworlh a bien marqué cette différence entre les deux modes de poésie populaire. Lorsqu'il aperçut dans uu champ la fille solitaire des Highlands qui, tout eu coupant et en liant le grain, chantait pour elle-même un chant mélancolique, si i)ien que la mélodie emplissait levai profond, il marqua nettement le caractère des ballades et des chansons.

Personne ne nie dira-t-elle ce qu'elle_.chante ? Peut-être ces vers plaintifs s"épanchent-ils ' Pour d'anciens nialiieurs éloignés, Et des batailles du temps jadis ; Ou bien est-ce un chant plus humble, Matière familière d'aujourd'hui — Un chagrin, un deuil, une peine naturels, Qui ont existé, et peuvent exister encore.^

Avec les chansons, Burns était sur son terrain. Klles lui parlaient de choses qu'il avait ressenties ou qu'il avait vues circuler aut^r de lui. Il devait trouver en elles quelque chose de la vie actuelle, réelle, présente, telle qu'il l'aimait, la voyait et la rendait. 11 devait les aimer, par suite des mêmes tendances d'esprit qui le rendaient indifférent aux ballades.

Mais ce ne sont là que des hypothèses. Les faits valent mieux. Les voici. Les chansons populaires ont été pour Burns une passion de toute la vie. Enfant, il les avait entendu chanter par sa mère, il en avait été bercé. Son premier amour fut en partie inspiré par elles, car il aima la première fillette qu'il ait aimée, la petite moissonneuse, parce qu'elle chantait doucement. Sa première composition poétique fut une chanson qu'il composa sur un re^/ favori de cette fillette ^. Plus tard, ce fut avec un recueil de chansons qu'il commença à former son goût littéraire :

« La collection de chansons était mo%vade mecum. Je m'absorbais dans celle lecture lorsque je conduisais mon cliariol ou que j'allais au travail, chanson par chanson, vers par vers, notant soigneusement ce qui était vraiment tendre el sublime, de l'afifectation et du clinquanl »2.

Sa première ambition littéraire fut d'écrire une chanson en l'honneur du pays écossais :

Je formai alors un vœu, je me rappelle son pouvoir,

Un vœu qui, jusqu'à ma dernière heure,

Soulèvera puissamment ma poitrine,

1 The Solilary Reaper.

2 Autobiographical Lelter lo Dr Moore.