Page:Anglade - Les troubadours, 1908.djvu/111

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sent pas plus que celui qui se gratte jusqu’au moment où il s’écorche tout vif. » « Amour pique plus doucement qu’une mouche, mais la guérison est bien plus difficile. » « Amour est semblable à l’étincelle qui couve au feu sous la suie et qui brûle la poutre et le chaume (de la maison) ; puis celui qui est ruiné par le feu ne sait où fuir. » Ce sont là, comme on voit, les traits ordinaires des satires contre l’amour ; mais ils sont présentés ici avec une certaine vigueur et aussi avec quelque originalité dans les comparaisons. Il y a d’ailleurs dans l’œuvre de Marcabrun des satires plus énergiques et plus vigoureuses encore, mais d’une crudité intraduisible.

Et pourtant le même poète a su parler avec discrétion et délicatesse de ce sentiment, comme dans la strophe suivante « Qui veut sans tromperie donner l’hospitalité à l’amour doit joncher sa maison de courtoisie, en proscrire la félonie et le fol orgueil… » Il se plaint ailleurs des troubadours médiocres qui, entre autres erreurs, mettent sur le même pied le « faux » amour, l’amour peu sincère, avec l’amour « pur et parfait ». L’amour ainsi entendu est le « sommet et la racine » de toute joie, la sincérité fait sa force et sa « puissance s’étend sur de nombreuses créatures ».

Ainsi même ce contempteur de l’amour sait trouver les accents justes et sincères pour chanter non pas la passion vulgaire, mais l’amour ennobli tel qu’il le conçoit et tel que le conçurent en somme les troubadours. Par ce côté il est de leur lignée. Il l’est