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d’Auvergne à la cour d’Ermengarde, vicomtesse de Narbonne, et à celle de Raimon V de Toulouse. C’étaient les plus brillantes qui fussent alors dans le Sud de la France ; elles furent deux foyers vivants de poésie pendant la seconde moitié du xiie siècle.

Parmi les poésies de Pierre d’Auvergne quelques-unes sont des poésies religieuses : elles seront étudiées dans un des chapitres suivants. Une dizaine ont trait à l’amour. Elles ne se distinguent guère de la plupart des poésies consacrées par les troubadours à leur thème favori. Ce sont les mêmes plaintes sur la cruauté et l’orgueil de sa dame qui ne daigne lui témoigner aucune pitié. « La dame chantée par le poète, dit son éditeur, n’est qu’une ombre sans nom, sans individualité, sans personnalité. » Ceci est d’autant plus grave que nous sommes à peine dans la période classique, encore près des origines.

Mais Pierre d’Auvergne était capable, le cas échéant, de sincérité et ce fut au moins une fois un gracieux poète. Il trouva une manière originale d’envoyer un message d’amour ; le poétique messager fut un rossignol. Et voici la charmante composition où l’oiseau du printemps joue le principal rôle. Le poète s’adresse en ces termes à son messager ailé.

« Rossignol, en sa retraite tu iras voir ma dame, dis-lui mes sentiments et qu’elle te dise sincèrement les siens ; qu’elle me les fasse connaître ici…, et que d’aucune manière elle ne te garde auprès d’elle… »

L’oiseau gracieux s’en va aussitôt, droit vers le pays où