Page:Anglade - Les troubadours, 1908.djvu/183

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celle du bien et celle du mal : c’était le fond du dualisme manichéen, c’était la croyance des cathares albigeois. Une autre hérésie, celle des Vaudois, était née à Lyon — mais elle avait recruté de nombreux adeptes dans le Languedoc : Vaudois et Albigeois étaient confondus par l’Église dans une réprobation commune. On sait comment elle s’y prit pour extirper l’hérésie jusqu’en ses racines[1].

Les seigneurs du Midi étaient coupables non pas d’hérésie, mais de faiblesse et d’indulgence pour les hérétiques ; ils étaient d’une tolérance rare pour le temps ; le pape Innocent III appela contre eux les barons du Nord ; ils accoururent en foule à cette nouvelle croisade, moins dangereuse en somme que les expéditions d’outre-mer et qui promettait des bénéfices plus immédiats.

L’armée des croisés marqua son passage par le siège et le pillage de Béziers et de Carcassonne. À Béziers sept mille personnes périrent dans la seule église de la Madeleine[2]. Toulouse fut d’abord épargnée, parce que Raimon VI et la bourgeoisie se soumirent en quelque manière aux croisés ; mais les exigences de ces derniers devenant trop fortes, bourgeois et comte prirent les armes.

La guerre fut menée avec vigueur et unité du côté des croisés, avec mollesse, et avec peu d’entente du côté des seigneurs méridionaux. Simon de Montfort, comte de Leicester, ravagea le Languedoc sans trêve ni cesse ; les principales forteresses tombèrent en son pouvoir et s’il éprouva quelques légers échecs, ils

  1. Cf. Lea, Histoire de l’Inquisition, trad. fr., Paris, 3 vol.
  2. Cf. pour une partie de ce qui suit A. Luchaire, Innocent III, la croisade contre les Albigeois, Paris, 1905.