Page:Anglade - Les troubadours, 1908.djvu/202

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Italie, à la cour de l’empereur Frédéric II. Le milieu où il était né et celui où il vécut n’étaient pas faits pour développer ses sentiments de respect envers la papauté. On lui doit en effet la satire la plus violente et la plus hardie que le moyen âge se soit permise contre cette puissance. On en jugera par les extraits suivants.

Je ne m’étonne pas, Rome, si le monde est dans l’erreur, car c’est vous qui avez déchaîné dans le siècle les maux de la guerre… Rome trompeuse, la convoitise vous trompe aussi, car à vos brebis vous tondez trop de laine…

Rome, aux hommes simples vous rongez la chair et les os et vous menez les aveugles avec vous dans la fosse ; vous foulez aux pieds les commandements de Dieu, et votre convoitise est trop grande, car vous pardonnez les péchés pour de l’argent. Rome, vous vous chargez d’un grand fardeau de crimes. Puisse Dieu vous abattre et vous faire déchoir, car vous régnez pour l’argent… Rome, vous tenez votre griffe si serrée que ce que vous pouvez tenir vous échappe difficilement…

Et voici le trait final de cette série d’invectives :

Rome, vous avez l’allure simple de l’agneau, mais au fond vous avez la rapacité du loup ; vous êtes un serpent couronné, engendré de vipère, et le diable vous aime comme son intime ami[1].

Cette attaque ne resta pas sans réponse ; le champion de la papauté fut une poétesse, une dame de Montpellier, dame Gormonde. Elle répond strophe par strophe à la pièce de Guillem Figueira ; elle souhaite à Toulouse, la patrie du mécréant, et au comte Raimon tous les malheurs possibles. Mêmes

  1. Crescini, Manualetto, p. 327. La pièce se compose de vingt-trois strophes.