Page:Anglade - Les troubadours, 1908.djvu/262

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allusions à la bonne humeur, au bon accueil des Catalans sont nombreuses dans l’œuvre des troubadours ; voici comment s’exprime l’un d’eux dans une pièce à refrain.

Puisque mon étoile n’a pas voulu que de ma dame me vienne le bonheur… il faut que je me mette dans la voie du vrai amour : et cette voie je l’apprendrai bien dans la gaie Catalogne, parmi les Catalans vaillants et les Catalanes aimables. Car courtoisie, mérite et valeur, joie, reconnaissance et galanterie, libéralité et amour, connaissance et grâces, toutes ces qualités sont l’apanage de la Catalogne, où les hommes sont vaillants et les femmes aimables[1].

Comme les troubadours italiens, les troubadours catalans écrivirent en provençal jusqu’au xive siècle, quoique de belles chroniques[2] aient été composées en prose catalane pendant le règne de Jaime Ier d’Aragon (1213-1276) et de ses successeurs immédiats.

Ce roi, qu’on a appelé le « Conquistador » à cause de ses victoires sur les Maures, est un de ceux qui, en Espagne, ont été le plus accueillants aux troubadours. Né à Montpellier en 1208, il aimait à revenir dans sa « bonne ville », toujours suivi d’un nombreux cortège de troubadours et de jongleurs. Plus d’un l’accompagna dans ses expéditions et reçut des terres, par exemple après le siège de Valence. Jaime d’Aragon accueillit surtout les troubadours languedociens qui s’exilèrent pour fuir les rigueurs de l’Inquisition ou qui ne s’accommodaient pas du nouveau régime créé

  1. Guiraut Riquier, Gr., 65 ; cf. notre étude sur ce troubadour, p. 72 et 73.
  2. Sur ces chroniques qui forment « quatre perles de la littérature catalane du Moyen âge », cf. Grundriss der rom. Phil., II, 2 (L’histoire de la littérature catalane est de M. Morel-Fatio).