Page:Anglade - Les troubadours, 1908.djvu/275

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école. La première seule serait indépendante de toute imitation.

Cette théorie a été contestée, en particulier par M. A. Jeanroy. Sans reprendre ici cette discussion, remarquons seulement, à la suite du savant auteur des Origines de la poésie lyrique en France, que plusieurs imitations d’auteurs provençaux paraissent évidentes chez les minnesinger de la première période. Toute cette poésie primitive, que l’on prétend populaire, « est déjà profondément imprégnée des théories courtoises de l’amour ». « L’amant fait hommage à sa dame de sa personne… il s’engage à faire tout ce qu’elle lui ordonnera ; il lui est soumis « comme le bateau l’est au pilote quand la mer est calme[1] ». Le service, le vasselage amoureux y est chose connue. Comme Jaufre Rudel, le minnesinger Meinloh a recherché sa dame pour sa « vertu ». « Quand je t’ai entendu louer, je voulais te connaître ; pour ta grande vertu, j’ai couru çà et là jusqu’à ce que je t’aie trouvée. » L’amour a un pouvoir ennoblissant, comme chez les troubadours ; comme eux aussi, et plus encore peut-être, si on en juge pas leurs plaintes, les minnesinger ont à souffrir des « médisants ».

Il semble donc que ce soit avec raison qu’on ait cherché et retrouvé jusque dans les plus anciens minnesinger des traces de l’imitation provençale. Aussi un des derniers historiens qui s’est occupé de la question divise-t-il les minnesinger en deux groupes[2] : le premier comprend ceux qui n’ont pas eu assez d’originalité pour s’élever au-dessus des modèles

  1. Jeanroy, Origines, p. 285-286.
  2. Lüderitz, op. laud., p. 5 et suiv. Aux « médisants » (lauzengiers) correspondent chez les Minnesinger les lugnære, merkære.