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xiie siècle) où l’on trouvera un écho de la poésie des troubadours.

Le rossignol a pour coutume de se taire quand il est amoureux, j’aime mieux l’hirondelle ; qu’elle aime ou qu’elle souffre, elle n’abandonne jamais le chant. Depuis que je dois chanter, je puis dire à bon droit : « Hélas ! comme j’ai prié longtemps là-bas, et comme j’ai pleuré auprès de celle où je ne vois aucune pitié. »

Si je cesse mon chant, on dit que le chant me conviendrait mieux ; si je me mets à chanter, je dois souffrir deux choses, haine et raillerie. Comment vivre pour celles qui vous empoisonnent avec de belles paroles ? Hélas ! cela leur a réussi et j’ai laissé mon chant pour elles ; mais je veux chanter comme auparavant.

Comme je regrette le meilleur temps que j’ai passé à leur service, comme je regrette mes beaux jours heureux ! Je déplore les nombreuses plaintes que j’ai fait entendre et qui ne lui sont jamais allées au cœur. Hélas ! quel nombre d’années perdues ! Je m’en repens en vérité ; je ne m’en accuserai plus.

Sourires, bon visage et bon accueil m’ont endormi longtemps. Je n’ai pas eu d’autre bien et qui veut m’accuser d’indiscrétion ment… Hélas ! sa vue seule était ma joie, je n’en ai dit aucun mal, mais je n’en ai eu aucun bien.

Quand un objet est rare, on lui attribue plus de valeur. On fait exception pour l’homme fidèle ; celui-là, malheureusement, on l’estime peu. Il est perdu, celui qui aujourd’hui ne sait aimer qu’avec fidélité. Malheureux ! à quoi cette fidélité m’a-t-elle servi ? Aussi suis-je dans la tristesse ; mais je sers toujours quoi qu’il advienne[1].

Nous n’avons pas à suivre l’histoire de la poésie lyrique en Allemagne ; on sait avec quel éclat les minnesinger du xiiie siècle la cultivèrent. Nous nous en voudrions cependant de ne pas citer au moins quel-

  1. Des Minnesangs Frühling, p. 127.