Page:Anglade - Les troubadours, 1908.djvu/53

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dernes. Ils étaient en pleine activité quand les troubadours commencèrent à chanter. Les jongleurs devinrent pour eux des auxiliaires : les troubadours grands seigneurs — et ils étaient nombreux à l’origine — leur confièrent souvent le soin de réciter les chansons qu’ils avaient composées. Leur rôle grandit ainsi, en même temps que le goût pour la poésie se développait.

Le rôle de ces deux classes, troubadours et jongleurs, étant bien délimité, il n’y avait pas de raison, du moins au début de leur histoire, pour qu’elles fussent rivales. Seulement il n’était pas rare de voir un jongleur s’élever au rang de troubadour. Le métier de jongleur exigeait certaines qualités : une mémoire fidèle et une grande habileté à toucher des instruments. À chanter ainsi les vers d’autrui, plus d’un sentit s’éveiller en lui le goût de la poésie, et son instruction générale de jongleur, sa connaissance de l’art et de la technique des troubadours lui permirent d’arriver à son tour au rang de poète. « Ce contact continuel entre troubadours et jongleurs favorisait la confusion des deux classes. » Vingt et un troubadours au moins furent en même temps jongleurs[1].

Cette confusion n’aurait pas été grave, si le rôle du jongleur était resté ce qu’il était à l’origine de la poésie des troubadours : celui d’un auxiliaire utile des poètes. Mais le discrédit qui pesait sur eux pendant le haut moyen âge et le bas-empire reparaissait avec le temps ; il retombait sur les deux classes[2].

  1. A. Stimming, dans le Grundriss de Groeber, II, B, p. 16.
  2. Cf. notre étude sur le dernier troubadour, Guiraut Riquier, p. 122 et suiv.