Page:Anglade - Les troubadours, 1908.djvu/99

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Je suis semblable au lion, qui s’irrite furieusement quand son lionceau vient au monde sans souffle et sans vie et qui en l’appelant de ses cris, le fait revivre et marcher ; ainsi ma chère dame et amour peuvent me secourir, et me guérir de ma douleur.

À chaque gaie saison reviennent avril et mai ; ma bonne étoile devrait bien revenir ; Amour a trop longtemps sommeillé ; il me donna le pouvoir d’aimer, sans m’accorder en même temps celui d’oser supplier ; ah ! que de grands honneurs m’ont ravis la timidité et la crainte !

Quelle magnifique récompense, et noble et sincère j’aurais eue ! Aussi je supporte avec joie mon fardeau, pourvu que sa pitié ne m’oublie pas ! Comme le marin qui ne peut s’échapper de sa nef naufragée qu’en se sauvant à la nage, ainsi, dame, je me relèverais si vous daigniez me porter secours.

Je suis triste et joyeux, tantôt je chante, tantôt je m’irrite… car amour s’est divisé dans mon cœur en amour joyeux et en amour triste… il me montre ses nobles qualités au milieu des ris et des pleurs.

En vous, dame, sont toutes les qualités possibles ; aucune n’y manque, dame ornée de toutes les vertus ; on ne saurait rien y ajouter, si seulement vous étiez hardie en amour. Vous êtes sans égale, mur, château et tour d’honneur, et fleur de beauté.

Une partie des mêmes thèmes se retrouve dans la chanson suivante ; si, au début, le poète se plaint avec quelque impatience de l’indifférence d’Amour à son sujet, il s’y déclare bientôt amant soumis et obéissant, serviteur fidèle de sa « dame », n’attendant rien que de sa pitié, de sa « merci ».

Je voudrais savoir si Amour voit, entend et comprend, car je lui ai demandé grâce bien sincèrement et je n’en obtiens aucune aide ; la pitié seule peut me défendre