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Page:Anicet, Feval - Le Bossu, 1862.djvu/135

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GONZAGUE.

Ah ! monseigneur, souffrirez-vous plus longtemps qu’un pareil misérable m’accuse, moi, sans témoins, sans preuves…

LAGARDÈRE.

J’ai mes témoins et j’ai mes preuves. (Mouvement.)

GONZAGUE.

Des témoins !… (Regardant autour de lui.) Où sont-ils ?

LAGARDÈRE.

Ils sont deux, et le premier c’est vous.

GONZAGUE.

Cet homme est fou.

LAGARDÈRE, le regardant.

Le second de mes témoins est dans la tombe.

GONZAGUE.

Ceux qui sont dans la tombe ne parlent pas.

LAGARDÈRE.

Ils parlent quand Dieu le veut… voici pour les témoins… le mort parlera… Quant aux preuves, elle sont là… dans vos mains, monsieur de Gonzague… mon innocence est dans cette enveloppe triplement scellée… Refusez donc de croire à la Providence qui vous foudroie… Vous avez produit vous, même ce parchemin, instrument de votre propre ruine… et vous ne pouvez plus le retirer, il appartient à la justice, et la justice vous presse ici de toutes parts… pour vous procurer cette arme qui va vous frapper, votre Peyrolles a pénétré dans ma demeure comme un voleur de nuit.

GONZAGUE.

Monseigneur !

LAGARDÈRE.

Allons, brisez ces cachets ?… Il n’y a là-dedans qu’une feuille de parchemin, l’acte de naissance de mademoiselle de Nevers.

LE RÉGENT.

Brisez ces cachets. Gonzague.

LAGARDÈRE.

Non… votre main hésite et tremble toujours… Vous devinez qu’il y a là autre chose, n’est-ce pas ? Je vais vous dire ce qu’il y a… au dos du parchemin, trois lignes écrites avec du sang… Nevers était auprès de moi la nuit du meurtre, ici… c’était ici… une minute avant la bataille, il voyait luire dans l’ombre les épées des assassins… et sur cette feuille qui est là-dedans… de son stylet trempé dans sa veine ouverte, il traça ces trois lignes qui disaient le crime et le nom de l’assassin.