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Page:Anicet, Feval - Le Bossu, 1862.djvu/41

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à ne jamais franchir le seuil de la chambre de la princesse, se condamnant ainsi à ne toucher ni à l’un ni à l’autre de ces deux trésors ; mieux vaut être comme moi pauvre et garçon.

HENRI.

Blanche de Caylus n’a donc pas oublié Philippe de Nevers ?

CHAVERNY.

Elle n’a pas cessé de porter le deuil de son premier mari… sa chambre est meublée de ses souvenirs, et c’est au-dessous du portrait de Nevers qu’elle a fait placer son prie-Dieu.

HENRI.

Comment donc alors a-t-elle oublié sa fille ?

CHAVERNY.

Elle la croit morte et voit avec terreur arriver le terme de la quinzième année de son veuvage.

HENRI.

Pourquoi ?

CHAVERNY.

Parce qu’au bout de quinze ans M. de Gonzague peut assembler un tribunal de famille et faire décider par lui que les droits de l’absente sont périmés et que sa mère doit entrer en possession de l’héritage.

HENRI.

Qui tomberait alors entre les mains de Gonzague.

CHAVERNY.

Il y compte bien, mais il a compté sans sa femme et sans moi.

HENRI.

Sans vous ?

CHAVERNY.

Oui… sans moi, qui suis comme lui cousin de Nevers à un degré inférieur c’est vrai… mais la princesse qui paraît cordialement détester son époux m’a dit il y a six mois… « Vous étiez, vous, un bon parent, un véritable ami de Philippe de Nevers… si Dieu m’a repris ma fille… c’est à vous que je laisserai l’héritage de son père. »

HENRI.

À vous ?

CHAVERNY.

Oh ! j’ai beaucoup de chances… on avait cru suivre la trace du ravisseur de l’enfant jusqu’aux frontières d’Espagne… La princesse a fait courir, chercher partout, promettant sa fortune à qui lui ramènerait sa fille… mais ses nombreux émissaires n’ont rien appris, rien trouvé. Alors je me suis dit…