(Au moment où elle va incliner la tête sur le prie-Dieu, son regard s’arrête sur le livre d’heures que le bossu y a placé.) Ce livre d’heures n’est pas le mien… qui l’a placé là ?… mon Dieu ! mon Dieu !… ce livre, je le reconnais, oui, c’est bien celui que j’ai remis à Philippe en lui donnant notre enfant ! Seigneur avez-vous fait un miracle ?… Ah ! il y a quelque chose dans ce livre… oui, une lettre… (Lisant.) « Dieu aura pitié, si vous avez foi, votre fille existe et vous sera rendue aujourd’hui. » — Ma fille, ma fille existe. (Lisant.) « Plus que jamais défiez-vous de Gonzague et souvenez-vous du signal convenu autrefois entre vous et Nevers. » (Parlant.) Sa devise. J’y suis. (Lisant.) « Pendant l’assemblée, restez assise auprès du portrait de Nevers ; quand il en sera temps, pour vous, pour vous seule ! Le mort parlera. Signé, Henri de Lagardère. » (Parlant.) Cette écriture ne m’est pas inconnue ; où l’ai-je vue déjà ?… Ah ! je me souviens, cette écriture est semblable à celle-ci. (Elle regarde le billet que lui a remis Chaverny.) Oui, la même main a tracé ces deux lettres, mon Dieu ! c’était donc vrai… Seigneur, si vous m’avez laissé vivre, c’est que vous deviez me rendre ma fille.
Madame, monsieur le vice-chancelier d’Argenson, désigné par monseigneur le Régent pour présider le tribunal de famille, fait demander à madame de Gonzague s’il lui plaît de descendre au grand salon.
Non, non, je ne quitterai pas cette chambre.
M. le chancelier est aux ordres de madame la princesse et se rendra auprès d’elle… si son désir est de recevoir ici.
Oui… ici… ici… (Madeleine sort. — Relisant.) « Quand il en sera temps pour vous, pour vous seule, le mort parlera. » (Elle retombe assise sur le grand fauteuil placé près de la portière.) Le mort parlera.
Scène IV
Madame, ces messieurs, pour prendre place, attendent votre bon plaisir.