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ANNALES DE LA SOCIÉTÉ J. J. ROUSSEAU

primer la Nouvelle-Héloïse. Malesherbes résiste, puis finit par donner son consentement à une combinaison qui profitera aux intérêts de Rousseau. Robin imprimera une nouvelle édition autorisée, mais il versera à Rousseau un présent de cent pistoles. L’impression est commencée malgré Rousseau et sans d’ailleurs que Rey soit averti. Jean-Jacques, avec une très belle et très scrupuleuse honnêteté, poussant bien plus loin que Malesherbes le souci des engagements tacites qu’il croyait avoir pris envers Rey[1], dut accepter ce qui s’était fait « à son insu ». Il réclama du moins le consentement de Rey. Rey donna ce qu’il ne pouvait contester puisque Malesherbes ordonnait et que l’édition était sous presse[2]. Du moins Rousseau voulut-il partager avec Rey ses cent pistoles. Rey refusa. Rousseau, comme compensation, lui céda pour mille francs le manuscrit du Contrat social dont il aurait pu, dit-il, tirer deux mille francs. Cette édition de Paris ainsi imprimée avant l’arrivée des ballots de Rey dut même, par ordre de Malesherbes, et dans l’intérêt de Robin qui n’aurait pu écouler un texte altéré, être vendue toute entière avant de commencer le débit de l’édition d’Amsterdam : « Robin, écrit de Lorenzi, le 28 janvier 1761, ne veut pour or ni pour argent livrer d’autres exem-

  1. Voir le très intéressant échange de lettres entre J. J. Rousseau et Malesherbes Œuvres, X, p. 237 ; Streckeisen-Moultou : J.-J. Rousseau. Ses amis et ses ennemis, Paris, 1865. Lettres du 29 octobre et du 13 novembre 1760, t. II, pp. 401-406.
  2. On voit donc ce que vaut la phrase de Rousseau du 28 janvier 1761 (cf. également Confession, VIII, p. 367, ou lettre à Malesherbes du 10 février 1761, X, p. 251) : « cette seconde édition se faisant par votre ordre et du consentement de Rey. » (Voir la lettre de Rey du 25 février 1761 : « J’ai donné les mains à la réimpression de Julie parce que je ne pouvais pas l’empêcher. »)