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SYSTÈME

Tout ce que j’ai dit ci-dessus peut, entre autres choses, concourir à expliquer comment il est souvent arrivé, dans la chambre des députés de 1814, que l’opinion du rapporteur de la commission centrale se trouvait en opposition avec celle de la majorité de cette chambre. Supposons, en effet, une chambre de 369 membres divisée, comme celle-là, en bureaux ; chaque bureau sera composé de 41 membres, dont la majorité absolue sera 21. Pourvu donc que, dans 5 bureaux, 21 membres soient d’un même avis, 5 membres de la commission centrale, formant la majorité de cette commission, et conséquemment le rapporteur nommé par elle, partageront aussi cet avis ; l’avis du rapporteur pourra donc ne représenter que celui de membres, lequel pourra être absolument opposé à celui des 264 membres restans, et formant par conséquent la très-grande majorité de la chambre.

Il est pourtant bien loin de ma pensée que la division d’une assemblée délibérante en bureaux, formés par la voie du sort, et périodiquement renouvelés soit vicieuse ; je la regarde même comme tout à fait indispensable, sur-tout lorsque l’assemblée est nombreuse. Elle régularise les conciliabules qui se formeraient inévitablement, mais qui, composés d’individus attachés aux mêmes idées, loin de s’éclairer par le choc des opinions, ne feraient au contraire que s’obstiner davantage en faveur de celles qu’ils auraient d’abord embrassées. D’ailleurs, la division en bureaux, en ébauchant les discussions, leur donne à la fois plus de décence et de maturité : elle peut mettre des hommes, d’abord peu au courant des matières auxquelles ces discussions sont relatives, mieux en état d’y prendre part ; elle permet de mettre à profit les lumières de beaucoup d’hommes recommandables qui, à des connaissances très-étendues et à un esprit droit, ne joignent pas un talent oratoire très-prononcé ; enfin elle neutralise les efforts que ceux qui ont ce talent en partage pourraient tenter, dans la vue de maîtriser ceux de leurs collègues à qui la tactique de la tribune est peu familière. L’espèce d’opposition qui peut exister quelquefois entre l’avis de la commission