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Page:Annales de mathématiques pures et appliquées, 1819-1820, Tome 10.djvu/291

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REPRÉSENTATIF.

gement dans leur situation. L’élection de la totalité des députes de la France se trouve donc livrée à la discrétion d’environ soixante mille petits marchands ou petits propriétaires, sans éducation, sans dignité personnelle, et totalement dépourvus, pour la plupart, de toute vue politique un peu élevée et lointaine.

C’est à ce vice radical de notre système électoral que M. Flaugergues se propose d’indiquer un remède. Celui qu’il choisit consiste à remplacer le collège électoral unique de chaque département par plusieurs autres, dont chacun élirait un certain nombre de députés, et d’organiser ces collèges de telle sorte que l’on soit à peu près certain que les choix y seront faits à l’unanimité. Homogénéité d’intérêts parmi les électeurs d’un même collège ; diversité d’intérêts parmi les députés élus ; tel est en peu de mots le principe de M. Flaugergues. Ce principe est très-bon sans doute ; mais voyons comment l’auteur prétend l’appliquer.

M. Flaugergues, considérant le rôle des contributions comme le tarif présumé des opinions politiques des diverses classes de citoyens, crée, dans chaque département, trois collèges respectivement formés des grands, moyens et petits propriétaires ; mais croit-il de bonne-foi que, dans de tels collèges, les choix soient toujours faits, je ne dis pas à l’unanimité, mais même à une grande majorité ? Manque-t-il en France de porte-faix qui se piquent de penser comme des marquis, et, à l’inverse, dans le cours de notre révolution, n’a-t-on pas vu plus d’un grand seigneur s’attacher au char des Chabot et des Marat ? On ne saurait disconvenir néanmoins de l’extrême droiture de l’intention première de M. Flaugergues. Voyons donc s’il ne serait pas possible d’en tirer un parti plus heureux.

Je comparerais volontiers des ministres, en présence d’une chambre de députés des départemens, à un général qui, la veille d’une opération militaire, examine avec soin la carte topographique du terrain sur lequel il doit manœuvrer ; et, pour suivre le parallèle jusqu’au bout, je comparerais les soins que se donnent ces ministres pour