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SYSTÈME

influencer les élections, à ceux que prendrait le même général pour se procurer des cartes inexactes, sur lesquelles les distances seraient abrégées, les montagnes abaissées et les sentiers élargis. Je crois donc que, plus encore dans l’intérêt du gouvernement que dans celui des gouvernés, c’est une condition de rigueur que la chambre dite des représentans soit, en effet, une représentation autant fidèle que possible de la nation pour laquelle elle doit consentir des lois ; qu’elle en soit, s’il est permis de s’exprimer ainsi, une sorte de miniature ; et que les ministres se trouvent là, à peu près, comme dans le forum des petites républiques de l’antiquité.

Si donc il existe encore au milieu de nous des hommes assez fous pour ne rêver que dîmes, intolérance, châteaux et justices seigneuriales ; s’il en est d’assez niais pour aspirer à donner un gouvernement républicain, c’est-à-dire, un gouvernement tout d’abnégation et de sacrifices, à de vieux égoïstes, à de vieux sybarites comme nous, s’il en est pour qui des fers dorés, tous couverts de lauriers, puissent encore avoir quelque charme ; s’il en est enfin qui, par une antipathie aveugle et obstinée contre la dynastie régnante, lui préféreraient tout gouvernement quelconque autre que le sien ; il faut que le ministère le sache ; il faut qu’il connaisse exactement, ou du moins à très-peu près, dans quelle proportion sont ces diverses classes d’individus, tant entre elles qu’avec la masse de la nation, qui ne demande que l’entière conservation de ce qui existe ; il faut, en un mot, pour que ces gens-là ne songent pas à conspirer dans l’ombre, pour qu’ils puissent rougir eux-mêmes de l’infériorité de leur nombre, il faut, dis-je, qu’ils aient des organes dans la chambre représentative ; il faut aussi qu’ils puissent élire leurs représentans.

Mais, dira-t-on, ne se pourrait-il pas que la majorité de la nation fût infatuée de doctrines subversives de l’ordre social ? et alors quelle chambre de députés pourrait-on en attendre, si les élections n’étaient pas habilement maîtrisées et dirigées ? À cela je réponds que d’abord ceux qui feraient cette objection calom-