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DE LA LANGUE

fût ainsi ; et telle est la cause de la diversité presque infinie des langues tant anciennes que modernes. C’est un grand mal sans doute ; mais c’est un mal qui ne saurait être réparé que par l’institution d’une langue philosophique, très-difficile à créer, et plus difficile encore à faire universellement admettre, quelque simple et quelque parfaite qu’on voulût d’ailleurs la supposer. Laissons donc là les langues vulgaires ; mais, puisque chaque jour voit introduire de nouveaux signes dans la langue des diverses sciences, examinons quelles sont les maximes qui doivent présider à l’institution de ces signes, et jusqu’à quel point les signes déjà institués s’approchent ou s’éloignent des conditions qui, un conséquence de ces mêmes maximes ; en auraient dû régler le choix.

I. Il est d’abord évident que plus un signe d’institution approchera d’être naturel et moins aussi l’esprit aura d’effort à faire pour en découvrir et pour en retenir la signification. Ainsi, par exemple, le boulanger qui étale des pains sur le devant de sa maison, pour annoncer aux passans qu’il en fait le commerce, se fait comprendre des étrangers comme des nationaux, tandis qu’un étranger peut fort bien ne pas comprendre ce que signifie le rameau vert qui sert d’enseigne à nos cabaretiers, parce qu’ici le signe n’a plus aucune analogie avec la chose signifiée. Un pampre remplirait cette destination d’une manière moins imparfaite.

II. Lorsqu’un signe est purement conventionnel, il serait fort à désirer que la convention qui en règle l’usage fût aussi universelle qu’il se pourrait. C’est, en particulier, ce qu’on s’est proposé en France dans l’institution des mesures métriques. C’est aussi parce que les symboles algébriques ont été généralement adoptés par tous les géomètres de l’Europe, qu’il est si facile d’entendre des traités d’analise écrits dans une langue qu’on ne possède qu’imparfaitement, et dans lesquels le progrès du calcul aide si puissamment à l’intelligence du texte. La même considération ne pourrait également que rendre fort désirable l’adoption, proposée par Volney,