Page:Annales du Musée Guimet, Bibliothèque d’études, tome 12-13.djvu/73

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sionnaire, le respect de la fidélité dans le mariage : « Mais quant elles sont mariées, si les tiennent trop chières, et ont pour trop grant vilonnie se l’un touchast la femme à l’autre, et se gardent moult de ceste honte, depuis qu’ils se sont mariés avec si faites femmes[1]. »

Sans entrer dans aucun détail, le père Huc constate que « les Thibétains sont bien loin d’être exemplaires sous le rapport des bonnes mœurs ; il existe parmi eux de grands désordres ». « Mais, » continue-t-il, « une chose qui tendrait à faire croire que, dans le Thibet, il y a peut-être moins de corruption que dans certaines autres contrées païennes, c’est que les femmes y jouissent d’une grande liberté. Au lieu de végéter emprisonnées au fond de leurs maisons, elles mènent une vie laborieuse et pleine d’activité[2]. »

De son côté, Samuel Turner fait les mêmes constatations par rapport à la condition des femmes, mais il est muet sur la question d’immoralité, et de ses dires on pourrait plutôt conclure à une assez grande retenue de la part des hommes : « Tous paraissent avoir des attentions pour les femmes ; mais, très modérés dans toutes leurs passions, leur conduite à l’égard du beau sexe est également éloignée de la grossièreté et de l’adulation. Les femmes du Tibet occupent dans la société un rang plus distingué que leurs voisines du midi. Non seulement elles jouissent d’une entière liberté, mais elles sont maîtresses de maison et compagnes de leurs époux[3]. »

Tout différent est ce portrait de la femme tibétaine tracé par une autre main. « Ici la femme va et vient, vaque à ses occupations de ménage ou de commerce sur la place publique, se livre à l’agriculture, file devant la porte de sa maison en bavardant avec les commères, entreprend aussi de longs voyages, tantôt à pied, tantôt à cheval ; sous ce

  1. G. Pauthier, Le Livre de Marco Polo, t. II, p. 373.
  2. Huc, Voyage dans la Tartarie et le Thibet, t. II, p. 260.
  3. S. Turner, Ambassade au Tibet, t. II, p. 145.