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Page:Annales du Musée Guimet, Bibliothèque d’études, tome 22-23.djvu/969

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LA THÉOSOPHIE BRAHMANIQUE

sont, ou bien visibles, — la cessation de la souffrance[1], — ou invisibles, — la perception immédiate de l’Être qui fait l’objet de la méditation, c’est-à-dire d’Īśvara ou du puruṣa. La deuxième période du yoga est celle où il est « inconscient », asamprajñāta : l’organe pensant se résout en sa cause, la prakṛti ; le sentiment de la personnalité se perd ; le sujet qui médite, l’objet sur lequel s’arrête sa pensée, l’acte même de la méditation, ne font plus qu’un. On dit que le yoga est en ce moment « sans support », nirālambana, la méditation n’ayant plus besoin d’un véhicule ou d’un symbole[2]. Et comme les saṁskāra qui ont commencé à développer leurs effets sont eux-mêmes consumés[3], le fruit qu’on recueille, c’est la libération ; le yogin n’a qu’à la désirer, pour qu’elle se réalise immédiatement (svecchayā mokṣaḥ, Y. S. S., p. 6).

IV. L’apprentissage du yoga

N’est pas yogin qui veut, ni dès qu’on a la fantaisie de l’être. Pour réussir dans cet art difficile, il faut une longue et attentive préparation. « Il est aisé de se tenir sur la lame affilée d’un rasoir ; ce qui est difficile, c’est de demeurer dans la fixité de la pensée quand on n’a pas l’âme préparée » (Mbhr. XII, 11090). — « Pour réussir dans le yoga, il ne suffit pas d’en parler ni de prendre le costume du yogin, il faut agir ; c’est la vérité ; n’en doutez pas » (H. Y. Pr. I, 66).

Les difficultés ne viennent pas des accidents de la naissance. Le yoga ne fait pas acception de caste ; il est infini-

  1. Tandis que le Sānkhya fait de la cessation de la souffrance le but suprême à atteindre, le Yoga n’en parle qu’en passant, comme du premier résultat obtenu par la discipline qu’il enseigne.
  2. La syllabe om dont les Upaniṣad prescrivent la méditation dans ses éléments successifs, dans sa résonnance finale, et dans le silence qui y met un terme, est appelée d’ālambana dans la Kāṭhaka-Upaniṣad.
  3. De là l’épithète de nīrbija « dénué de germes » qu’on donne à cette phase du yoga.