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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

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5 (17). Sous le règne du brave 15[2] Yima, il n’y avait ni froidure, ni chaleur 16[3] ; il n’y avait ni vieillesse ni mort, ni envie 17[4] créée des Daêvas.

Père et fils marchaient tous deux dans la taille de quinze ans 18[5], tant que régna l’homme aux bons troupeaux, Yima, le fils de Vîvañhańt 19[6].


6 (21). Quel est le second mortel, ô Haoma, qui te prépara pour le monde des corps ? De quel bienfait fut-il payé ? Quelle faveur lui en advint ?


7 (22). Le saint Haoma, qui éloigne la mort, me répondit :

Âthwya 20[7] est le second mortel qui me prépara pour le monde des corps.
  1. ceux qui mangent » (N. : kshuditânam « des affamés » ), comme si hvairyàn était un génitif pluriel à sens actif, ce qui n’est guère possible. — Glose : « quand un était mangé, un autre venait » (la multiplication des pains).
  2. 15. aurvahè ; Phl. arvand, N. utkrishtatara.
  3. 16. aotem, garemô : sarmâk, garmâk.
  4. 17. araskô. Phl. arishk, N. : îrshâ ; c’est le persan rashkn « envie, malice ».
  5. 18. L’àge paradisiaque, le sweet seventeen éternel. A la résurrection les enfants renaissent ayant l’age de quinze ans, les hommes l’âge de quarante (Bund. XXX, 28). Le moyen âge chrétien faisait renaître à l’âge de trente ans (Romania, 1880, 312).
  6. 19. Cf. Vd. II, 29, 80 ; Yt. IX, 8 ; XV, 15.
  7. 20. Après un règne prospère de six cent seize ans et six mois, Yima se laisse aveugler par l’orgueil, et se fait adorer comme dieu : aussitôt il perd le hvarenô, est renversé du trône et scié en deux par le serpent à trois têtes, Azhi Dahâka (v. Yt. XIX, 34 sq.). Le serpent Dahâka s’empare du trône de Yima et de ses deux femmes, Savahhavâc et Erenavâc (Yt. V, 34), désole la terre pendant mille ans et est à son tour renversé par Thraètaona, fils d’Athwya, qui l’enchaîne au mont Demâvand, où il restera prisonnier jusqu’à la fin des temps, pour être déchaîné une dernière fois et être anéanti par Keresàspa (Yt. XIII, 61).

    L’histoire de Dahâka est un débris de l’ancienne mythologie naturaliste, évhémérisée au cours des temps. Le serpent aux trois têtes est le serpent de l’orage contre lequel, dans les Védas, lutte le dieu de la lumière : l’étage mythologique est encore bien clair dans la lutte entre Azhi Dahâka et le dieu du feu Âtar, qui est la contre-partie des luttes védiques entre Ahi (ou Vritra) et Indra (Yt. XIX, 47-50).

    Une des formes védiques de ce mythe appelle le vainqueur Trita Âptya « Trita le fils des Eaux » et le montre tuant un monstre à trois têtes et à six yeux, ou à sept rayons (triçîrshânam saptaraçmim, X, 8, 8 : dàsam shalaksham triçîrshânam, X, 99, 6 : noter le mot dâsa, dont Dahâka est un dérivé ; I, 158, 4, le héros est appelé Tràitana et le monstre dâsa). Dans la légende iranienne, qui transforme le mythe en histoire, Azhi Dahâka, devenu Zohâk, est un tyran et un usurpateur étranger ; Thraètaona, Feridûn, est le libérateur. Feridûn est fils d’Athvin, de la famille de Jamshîd ; poursuivi par Zohàk, qui veut exterminer toute la famille royale, il est sauvé par l’ermite Hôm (transformation du dieu Haoma, dont Athwya fut le prêtre.