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ANNALES DU MUSÉE GUIMET


pratique même de ce Khêtûk-das, autorisée ou non par la religion, paraît dans l'Iran dès une époque ancienne. Hérodote attribue à Cambyse l’institution du Khêtûk-das entre frère et sœur (III, 31) ; cela prouve à tout le moins qu’au temps d’Hérodote déjà, c’est-à-dire au v° siècle avant notre ère, les Perses passaient pour le pratiquer. Cfésias, cinquante ans plus tard, connaît le Khêtûk-das entre mère et fils 10[1] ; à la même date, Antisthène reproche à Alcibiade d’imiter les Perses avec sa mère, sa fille et sa sœur 11[2], c’est-à-dire que dès le ive siècle, dix ou douze siècles avant le Dînkart, les trois formes impures de Khêtûk-das leur étaient attribuées à l’étranger. A partir du iie siècle avant notre ère la série des témoignages devient continue. Je ne relèverai que deux des plus importants : l’un de Catulle, qui semble faire du Khêtûk-das entre mère et fils un privilège ou une loi de la caste sacerdotale :

Nam Magus ex matre et gnato gignatur oportet,
Si vera est Persarum impia relligio ;


l’autre de Philon le Juif (ier siècle), qui en fait un privilège de noblesse : « en Perse, les grands épousent leur mère et on regarde les enfants nés de ces unions comme les plus nobles et on dit qu’ils seraient dignes du trône » 12[3].

Dans quelle mesure ce Khêtûk-das fut pratiqué et dans quelle mesure la religion le justifia, ce sont là deux questions indépendantes et sur lesquelles les données manquent également, pour la période ancienne. Les exemples particuliers que les classiques nous transmettent sont naturellement les exemples illustres, généralement des exemples royaux : Cambyse épousant ses deux sœurs ; Artaxerxès Mnémon. Les Persans l’ont confondu avec Artaxerxès Longue-Main épousant sa fille Atossa 13[4] ; au

  1. 10. Persas cum suis matribus misceri Ctesias referi (Tertutlien, Apolog., IX).
  2. 11. συνείναι γάρ φησίν αύτόν καί μητρί καί θυγατρί καί άδελφή, ώζ Πέρσαζ (Athénée, V. 20).
  3. 12. μητέραζ γάρ, οί έν τέλει Περσών, τάζ αύτών άγονται, καί τούζ φύονταζ έκ τούτων εύγενεστάτουζ νομίζουσι, καί βασιλείαζ τήζ μεγίστηζ, ώζ λόγοζ, άξιούσιν (De specialibus legibus ; ed. 1640, p. 778). Voir les textes recueillis par Brisson, De regio Persarum principatu, II, ed. 1710, pp. 493 suite.
  4. 13. Le Bahman Dirâz-dast (Bahman Longue-Main) de la légende, père et époux de Humâi : « elle faisait dans le monde la joie de son père, dit le Shah Nâma, et il l’épousa à cause de sa beauté, conformément à la religion dite pehlvie » (c’est-à-dire à la religion de la Perse ancienne).