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ANNALES DU MUSÉE GUIMET
posé de l’appeler vieux bactrien, dans l’hypothèse qu’elle représenterait la langue de la Bactriane, le pays du premier prosélyte de Zoroastre, Vîshtàspa : on verra dans le second volume que c’est là une hypothèse gratuite et nous conserverons le terme en usage, sans y attacher plus qu’une valeur conventionnelle.
La langue de l’Avesta était depuis longtemps une langue morte, dont le sens s’était conservé dans la tradition des écoles théologiques, mais menaçait de se perdre. On rédigea donc des traductions du livre sacré dans la langue du temps, le pelhvi, qui est la forme que le vieux perse des Achéminides avait prise au bout de cinq siècles. Ces traductions représentent le sens traditionnel prêté au vieux texte et que l’on désignait sous le nom de zend, littéralement « connaissance ». On prétendait que ces explications traditionnelles émanaient de la même source que le livre même, c’est-à-dire de Zoroastre en personne[1]. C’était là une fiction absolument nécessaire pour étayer l’autorité des traductions sassanides, car le livre étant rédigé dans une langue morte et présenté subitement à la vénération du peuple, il fallait bien que ces traductions, pour remonter au sens de l’original par-dessus les siècles, pussent s’appuyer sur une tradition qui emportât l’obéissance. Aussi la traduction pehlvie quand elle veut désigner l’ensemble des textes sacrés emploie-t-elle les termes Apastàk u Zend « l’Avesta et le Zend », c’est-à-dire le texte sacré et son explication autorisée et sacrée[2]. Il ne paraît nulle part qu’il y ait jamais existé un livre
  1. Maçoudi, II, 126 : « Le livre primitif est, nommé bestah. Pour en faciliter l’intelligence, Zeradecht compose un commentaire qu’on nomma zenda [ici un mot en alphabet arabe] ; il rédigea plus tard un autre commentaire qu’on nomme bazend [ici un mot en alphabet arabe] ; enfin, après sa mort, les docteurs de cette religion donnèrent une glose et une explication nouvelle des deux commentaires précédents, c’est ce qu’ils nomment baridah [ici un mot en alphabet arabe] (ou bariza [ici un mot en alphabet arabe]) » — Le zenda correspond au Commentaire pehlvi : le bazend (pàzand) désigne les transcriptions en iranien pur et en caractères zends ou persans que l’on fît des textes pehlvis, rendus trop obscurs et par la complication de leur alphabet et par la masse des mots sémitiques (on convient de donner à ces transcriptions le nom de pazend ou de parsi, selon qu’elles sont faites en caractères zends ou persans : voir Études iraniennes, I, p. 41). — La forme originale et le sens de baridah sont inconnus.
  2. De là l’emploi abusif de l’expression Zend-Avesta pour désigner le livre sacré (Haug). — Zend, comme on voit, ne désigne ni un texte ni une langue ; à la rigueur, on pourrait l’employer pour désigner le texte pehlvi, mais jamais le texte de l’Avesta et encore moins sa langue.