Page:Anonyme - La goélette mystérieuse ou Les prouesses d'un policier de seize ans, 1886.djvu/18

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tempérament nerveux et agité ; et pour le moment, ses nerfs étaient visiblement excités par quelque fâcheux incident.

— Je crois, mon bon ami, que nous pouvons nous vanter d’être dans la nasse. La nasse est justement le mot qui convient, remarqua le gros homme avec une tranquillité narquoise qui parut ajouter encore à la mauvaise humeur de son associé.

— Vous voulez dire que nous sommes déshonorés, ridiculisés, bons à montrer au doigt pour faire rire les petits enfants ! Encore une nouvelle émission de faux billets de dix piastres ! Toujours de la banque de Montréal ! Du train dont marchent ces gueux-là, il y aura bientôt de quoi faire sauter la banque d’Angleterre ! Et dire qu’ils travaillent à notre barbe ; et que depuis trois mois qu’ils se fichent de nous, nous ne sommes pas seulement parvenus à déterrer un indice quelconque ; pas une trace !

— Oh ! cela viendra, cela viendra, reprit avec placidité le premier interlocuteur. Il faut laisser faire le temps.

— Et pendant ce temps là, le temps marche contre nous, répliqua aigrement le petit homme. Tout ce que nous avons fait, jusqu’à présent, n’a servi qu’à mettre l’ennemi sur ses gardes ; et l’obscurité qui nous enveloppe devient chaque jour plus épaisse.

— Pas du tout, mon garçon, tu exagères. Au début, nous ne savions rien, et maintenant nous n’en savons pas davantage ; c’est simplement ce que j’appelle le statu quo. Mais sois tranquille, la lumière se fera.

— Tôt ou tard ! n’est-ce pas ? reprit le petit homme de plus en plus impatienté ; je crois que si un tremblement de terre engloutissait l’hôtel et nous avec, cela ne vous ferait pas bouger !

— Je ne peux pas te répondre là-dessus, mon garçon ; ce sont de ces choses qu’on ne peut dire qu’après expérience.

— N’empêche que c’est irritant. Il ne m’était pas encore arrivé d’être aussi longtemps sur une affaire, et de rester ainsi en pleines ténèbres. Ce serait à croire que c’est nous qui sommes