Page:Anonyme - La goélette mystérieuse ou Les prouesses d'un policier de seize ans, 1886.djvu/25

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gros lot. Jusqu’à présent, je ne vois encore qu’une tête d épingle, mais je crois qu’elle nous conduira à quelque chose de beaucoup plus gros. Au revoir ; je vous avertirai si j’ai besoin d’aide ; et, avec une dignité qui lui eut permis d’aspirer à un emploi dans les rôles tragiques, Joe sortit de la chambre sans jeter un regard en arrière.

— Eh bien, Tom, dit M. Parry, je crois que vous êtes floué.

— Qui vivra verra, dit M. Harrison. Je suis tout à fait d’opinion contraire.


CHAPITRE IV

FRAIS DE TOILETTE NÉCESSAIRES


Joe n’avait pas réclamé dix piastres, par amour du lucre. Il avait des intentions bien arrêtées sur l’emploi de cette somme qui lui avait paru indispensable à la suite de ses opérations ; efen sortant de l’hôtel Richelieu, il se dirigea tout droit, rue Craig, vers une boutique de médiocre apparence, sur la porte de laquelle on lisait en grosses lettres : « Marchandises de seconde main, vieux habits à vendre. »

Le propriétaire de l’établissement, un homme au teint blafard, avec un nez en forme de patate, qui occupait sur son visage un espace démesuré, s’approcha du gamin, avec un air empressé.

— Qu’est-ce que je peux faire aujourd’hui pour mon jeune ami ? demanda-t-il en se frottant les mains, comme il avait d’ailleurs l’habitude de le faire, toutes les fois qu’il parlait à ses pratiques.

— Je ne sache pas Maître Salomon Sly que j’aie eu le plaisir de vous rencontrer dans le monde, ni de vous compter au nombre de mes amis ; fit Joe avec une grande dignité. Veuillez rester à votre place et observer les distances.

Le Juif fit un pas en arrière, avec une mine abasourdie, pendant que Joe tâtait quelques vieux habits, avec l’œil d’un connaisseur.

— J’ai ici un superbe assortiment de costumes complets, reprit le Juif, qui eut bien vite retrouvé son assurance, et je puis vous habiller de façon à faire de vous un vrai petit gentleman. Que vous montrerai-je ?

— Apportez-moi cette jaquette, demanda Joe.

— Voyez moi, quel œil il vous a ! Il tombe, du premier coup,