Page:Anonyme - La goélette mystérieuse ou Les prouesses d'un policier de seize ans, 1886.djvu/4

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Vous avez voulu rire ou bien vous vous êtes trompé de date. Nous sommes au premier août, mon oncle, ce n’est pas le temps des poissons d’avril.

Lafortune posa sa pipe sur la table, et parut se demander s’il fallait rire ou se fâcher.

— Je vous remercie, fit Joe, en se saisissant de la pipe avec l’agilité d’un jeune chat. Vous êtes bien bon d’avoir remarqué que mon cigare était fini, et il mit tranquillement la pipe à ses lèvres.

Lafortune fit le geste d’un homme littéralement abasourdi par un tel excès de gaminerie impudente ; puis, il pensa sans doute qu’une, correction infligée à l’audacieux usurpateur, amènerait une bagarre dans laquelle sa chère pipe courrait le risque d’être mise en morceaux ; et il se décida à se rasseoir en se bornant à faire entendre un juron énergique.

— Tu es un excellent messager, Joe, et je vois que j’ai été un triple sot de me figurer qu’on ferait jamais rien de bon avec toi.

— C’était donc sérieux ? fit Joe avec un air d’innocence admirablement joué.

— Comment cela ?

— Dam ! mon oncle, de bonne foi, on s’y serait trompé. Voyons ! vous me parlez d’une bande mystérieuse, qui a émis pour plus de deux millions de faux billets ; et puis, au moment où je ne demandais qu’à me mettre au travail, on m’envoie regarder à la porte de M. Robert Halt, le professeur de musique, si ses élèves ont de jolis yeux et si elles sont blondes ou brunes. Si nous travaillons dans l’opérette, il fallait me le dire à l’avance.

M. Robert Halt est gravement compromis dans cette affaire de faux billets de banque.

— Voyons, mon oncle, ne me répétez pas cela. Je vous assure, vous me faites de la peine. M. Robert Halt est un de mes bons amis…

— J’ignorais qu’il eut cet honneur, dit Lafortune avec un