Page:Anonyme - Macaire, chanson de geste.djvu/35

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Préface.

compter du moment où le poëme est oublié. Personne, depuis Alberic de Trois-Fontaines, c’est-à-dire depuis 1240, ou environ, jusqu’en 1732, personne, à une exception près, ne fait mine d’en soupçonner l’authenticité, et tout le monde semble partager à cet égard le sentiment de Gace de la Buigne :

De preuve n’a mestier l’histoire,
Car en France est toute notoire.

Aussi est-elle reproduite au XVe siècle par un écrivain considérable du temps, par un grave historien, Olivier de la Marche, dans son Livre des Duels, autrement intitulé l’Advis de gage de bataille[1]. Le nouveau narrateur n’indique que vaguement la source où il puise son récit : Es anciennes cronicques ; on voit bien toutefois qu’il ne connaît pas le poëme d’où est sortie l’invention qu’il prend au sérieux. C’est par l’envie, comme Gaston Phébus, qu’il explique le crime de Macaire ; mais il insiste un peu plus sur ce point, comme s’il était mieux renseigné, et à l’entendre on le croirait sûr de son fait :

« Et dit la cronicque qu’un chevalier avoit un autre chevalier à compaignon, et pour ce que le compaignon estoit homme de verité et de grande vaillance, et de grande renommée, et estoit estimé, aimé et honoré du roy et des seigneurs, et avoit avancement devant le chevalier, ledit chevalier print telle envie et hayne sur son compagnon, que malicieusement et par orgueil, eux estans en un bois le che-

  1. Voyez ci-après Appendice, V, p. 319-321.