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Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 1.djvu/42

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de Robinson Crusoé.

engloutiroient, & que chaque fois que le vaisseau s’abaissoit, il allât toucher au fond de la mer, pour n’en plus revenir. Dans cette angoisse je fis vœu plusieurs fois, que si Dieu me sauvoit de ce voyage, & qu’il me fît la grâce de reprendre terre, je ne remonterois de mes jours sur un vaisseau, & ne m’exposerois plus à de pareilles misères ; mais que je m’en irois tout droit chez mon père, & me conduirois par ses conseils. C’est alors que je vis clairement combien étoient justes les observations sur l’état mitoyen de la vie, combien il avoit passé ses jours doucement é agréablement, n’ayant eu à essuyer ni tempête sur la mer, ni disgrace sur la terre. Ainsi me proposant la pénitence de l’enfant prodige, je résolus de retourner à la maison de mon père.

Ces sages & saines pensées durèrent autant de tems que dura la tempête, & même un peu au-delà. Le jour suivant, le vent s’étoit abattu, la mer appaisée, & je commençois un peu à m’accoutumer. Je ne laissai pas d’être sérieux toute la journée, me sentant encore indisposé du mal de mer. Mais à l’approche de la nuit le tems s’éclaircit ; le vent cessa tout-à-fait ; une charmante soirée s’ensuivit ; le soleil se coucha sans nuage ; & le lendemain il se leva de même. Ainsi l’air qui n’étoit agité que d’un vent doux & léger, l’onde unie comme la glace ; le soleil