Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 3.djvu/107

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ou, du moins, elles ne ſont chez lui qu’une bourraſque paſſagère. C’eſt le ſeul homme capable d’obſerver ce divin précepte de l’écriture ſainte, ſoyez fâché & ne péchez pas ; & ſi jamais il s’abandonne à la colère, elle n’eſt excitée que par les inexactitudes qu’il remarque dans ſa propre conduite.

Voilà ce qui s’appelle véritablement une perſonne ſociable, & propre à faire les délices d’une compagnie de gens ſenſés ; ſa conduite eſt plutôt à portée de l’admiration. Il y a une eſpèce de vertu à lui porter envie, & à ſentir de la mortification, en cherchant en vain, en ſoi-même, les aimables qualités qu’on trouve dans tout l’enchaînement de ſa conduite.

Quoique j’aie diſtingué d’abord le caractère d’un homme pieux d’avec celui d’un homme ſociable, parce qu’on peut conſidérer une même perſonne ſous ces deux différentes faces, je prie mon lecteur d’être perſuadé que cet homme heureux que je viens de peindre, eſt toujours un homme attaché aux devoirs de la religion. C’eſt une erreur groſſière de s’imaginer qu’une ame noircie par le vice, affaiſſée par le crime, balottée par l’extravagance, peut être ſuſceptible de ce calme, former ſes penſées libres & dégagées, répandre ſur les viſages cette ſérénité, & ſoutenir l’humeur dans cet agrément perpétuel.