Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 3.djvu/117

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à tous les autres, non-ſeulement quand il y a quelqu’apparence de vérité, mais même quand la ſupériorité des autres ſur eux, eſt évidente & généralement reconnue.

L’eſtime qu’on a pour ſon propre individu, eſt d’ordinaire grande à meſure que la baſe en eſt petite ; & en général ceux qui ont du mérite, ont aſſez de lumières, pour en connoître les bornes, & pour ne les pas étendre exceſſivement, dans leur imagination. Cette vanité outrée eſt le plus grand inconvénient du commerce civil ; elle détruit les agrémens de la ſociété, auſſi-bien que l’eſprit de celui qu’elle domine ; elle l’empêche d’éclairer ſon ame & de profiter des lumières des autres. Un tel homme, bien loin d’être dans la diſpoſition d’apprendre, ſe croit fait exprès pour endoctriner les autres.

Auſſi remarque-t-on d’ordinaire la vanité la plus exceſſive dans les plus grands fous ; l’impertinente eſtîme qu’ils font de leur habileté, les confirme dans leur folie, & les empêche d’en ſortir jamais. Être convaincu de ſa ſottiſe ou de ſon ignorance, c’eſt ceſſer d’être ſot & ignorant.

Peut-être, me dira-t-on, que l’extravagance & la vanité peuvent être un grand obſtacle aux agrémens du commerce, & le rendre utile à ceux qui en ſont poſſédés, comme elles le rendent choquant & déſagréable à ceux qui ont affaire avec