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(En ce moment il y en a le diable sait combien dans le village) —

Que les soldats moscovites, dis-je, ne fassent une descente dans la dépense.

Riabko ne dort pas, mais il aboie et hurle,
Que je sois pendu, si les oreilles ne m’en tintent.

Entre temps il se demande : que pourrais-je bien faire pour contenter mon maître ?

Sans se douter qu’il n’échappera pas à ce qu’on lui réserve.
Il aboie sans trêve jusqu’à ce que l’aube paraisse ;
Alors il s’allonge dans sa niche et se met à ronfler.
Pourquoi ne dormirait-il pas ? Sait-il ce qui va lui arriver ?
Il s’endort donc délicieusement du sommeil du juste
Qui a fidèlement gardé les biens de son maître.

Mais qu’est-ce ? un fracas, du bruit, des cris — toute la ferme est en mouvement.

« Ici, Riabko, ici ! tiens, tiens ! Faites venir Riabko ! »
— « Voilà, voilà, mes petits pères, dites, de quoi s’agit-il ? »
Riabko bondit, fait jouer sa queue dans tous les sens,
Tant il a de joie, comme un balai,
Le pauvre sot fait grincer ses dents de plaisir.
Ses yeux brillent comme ceux d’un furet, il se pourlèche les babines.
« Allons ça vient, pense-t-il, ce n’est pas en vain qu’à la ferme
Depuis l’aube même
Tout se trémousse autour de moi ;
Il se peut que le maître ait ordonné de me donner un peu de rôti
Ou que j’en reçoive un morceau de bouilli,

En récompense de ce que Riabko n’a point dormi de toute la sainte nuit,

Mais qu’il a aboyé à plein gosier pour chasser les voleurs. »
— « Ici, Riabko, ici ! » crie de nouveau un coquin de valet
Et il vous l’attrape par une oreille.
« Étendez, Riabko ! » crie-t-on. Et voici le maître qui s’amène.
« Donnez à Riabko une tournée, dit-il, étrillez-le ! Voici le fouet. »

« Pour quel motif ? » demande le malheureux ; mais le maître crie toujours : « Étrillez-le ! »

« Aïe ! Aïe ! Aïe ! » — Le maître dit : « Ne faites pas attention, continuez ! »
« Je ne le ferai plus, petit père !… Qu’est-ce qui me vaut cet honneur ? »

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