Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, I.djvu/248

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Cependant on entend tout d’un coup frapper rudement à la porte, avec de grands cris que faisoit le peuple qui s’y étoit amassé. Un moment après, la porte ayant été ouverte avec violence, les magistrats et leurs officiers entrèrent, suivis d’un grand nombre de toutes sortes de gens. Aussi-tôt deux archers, par l’ordre des juges, me saisissent, et me tirent hors de la maison, sans que je fisse aucune résistance. Dès la première rue par où nous passâmes, tout le peuple de la ville, qui accouroit de tous côtés, s’amassa autour de nous, et nous suivit en foule ; et quoique je marchasse fort triste, les yeux baissés jusqu’à terre, ou plutôt jusqu’aux enfers ; cependant, détournant un peu la vue, j’apperçus une chose qui me jeta dans une extrême surprise. De ce grand nombre de peuple qui nous entourait, il n’y en avoit pas un seul qui n’éclatât de rire.

Après m’avoir fait traverser toutes les places, et qu’on m’eût promené par les carrefours de la ville, comme on fait les victimes, quand on veut appaiser la colère des Dieux (3), et détourner les malheurs dont on est menacé par quelque funeste présage ; on me mène dans le lieu où l’on rendoit la justice, et l’on me met devant le tribunal. Les juges étoient déjà placés, et l’huissier faisoit faire silence, quand d’une commune voix, on demanda qu’un jugement de cette importance fût rendu dans la place où l’on représentoit les jeux (4), attendu la foule épouvantable