Page:Arène - La Chèvre d’or.djvu/162

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Ganteaume déballe les provisions, on s’installe sur l’herbe menue. Pendant quelques instants, un appétit noblement gagné par cette pittoresque mais rude montée nous fait oublier nos soucis d’amour.

— « Maintenant, tandis que je vais cueillir mes fleurs, libre à vous de contempler le paysage. »

Et Norette éclate de rire, toujours charmante et malicieuse.

Je relève la tête, mais le paysage a disparu… Un brouillard taquin, comme, à cette saison, il en rampe au flanc des montagnes, nous a sournoisement enveloppés. Un gentil brouillard, certes ! vrai brouillard de Provence, blanc, clair, plus léger qu’une gaze et tout pénétré de rayons. Arrivant sur nous par petits nuages pressés, il n’en cache pas moins l’étendue. Et d’en bas, tout près, le vent nous apporte les cocoricos des coqs dans les fermes, le bruit continu des flots.

— « C’est gentil de se savoir seuls ! »

En effet, la brume gagnant peu à peu, nous nous trouvons dans une atmosphère de nacre et d’opale, lumineuse pourtant, où Norette