Page:Arène - Les Ogresses - Tremblement de terre à Lesbos - Ennemie héréditaire.djvu/112

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Moi même ne ferais-je pas mieux après tout de suivre l’exemple du linot ? On nous enterrerait tous deux ensemble, le linot me montre la voie ! tous deux, dans un cimetière à l’herbe drue où, comme au village natal, des chats se chaufferaient au soleil sur de vieilles tombes et que personne de Paris ne connaîtrait. »

Nanette glissait peu à peu sur les pentes du pessimisme. Mais Nanette était excusable : le champagne a de ces effets.

Et, tout entière au sentiment de son inutilité irrémédiable et profonde, songeant que tant d’autres meilleures qu’elle, à la campagne et dans Paris, allaitaient des poupons, fabriquaient des fleurs en papier, cousaient des robes ou gardaient les oies et les vaches, Nanette, sincèrement, Nanette, en qui se réveillait la plébéienne, ressentit l’horreur d’elle-même et se résolut à mourir.

Mais où, comment ? Là était la sombre question. Après avoir quelque peu réfléchi, Nanette se décide pour la Seine.

— « Ce sera bientôt fait de passer sous les ponts, et doucement le fil de l’eau me portera ainsi jusque vers Mantes. Là, ma robe blanche s’accrochant aux branches basses d’un vieux saule, je m’arrêterai dans les remous, près du moulin où je fus servante. J’aurai le linot sur mon sein, les gars accourront du village, et le curé me trouvera. »