Page:Arène - Les Ogresses - Tremblement de terre à Lesbos - Ennemie héréditaire.djvu/152

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et lourds, aux rotondités copieuses, et transformé la frissonnante fleur d’églantier avec ses minces pétales prêts à partir au moindre souffle, en une splendide rose moussue, mi-ouverte, pommée comme un chou.

Une Turque se fût réjouie du changement, mais madame Olleris s’en désolait, ayant lu de mauvais poètes et s’étant laissé mettre dans la tête cette esthétique absurde qu’une femme n’est désirable que lorsque sa sveltesse la rapproche du lys ou du manche à balai.

Les femmes, chacun le sait, n’ont guère d’idées générales ; voici donc comment, à propos du portrait, madame Olleris raisonna : — « Si Anselme regarde avec tant de plaisir mon portrait d’il y a dix ans, c’est qu’alors il m’aimait et me trouvait belle. Le souvenir de ce que j’étais l’empêche évidemment d’apprécier ce que je suis. Peut-être m’aime t-il encore, mais il m’aime dans mon portrait. »

Et désormais, jalouse d’elle-même, ce qui est un comble, la douce Marthe Olleris se mit à faire au brave Anselme, qui comprenait de moins en moins, une existence insupportable.

Vous devinez les résultats.

Après un mois, à bout de forces, Anselme abandonna l’atelier laissant là ses toiles commencées, debout, le nez contre le mur, pareilles à des enfants qui boudent, sa palette sur laquelle les petits tas de couleur dessinaient des