Page:Arène - Les Ogresses - Tremblement de terre à Lesbos - Ennemie héréditaire.djvu/172

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étoiles, deux formes blanches immobiles, deux cygnes endormis qui, le cou sous l’aile, flottaient.

Tout à coup : un réveil, un battement d’ailes, quelque chose de comparable au bruit précipité des rames, un tourbillon, des plumes qui volent, un appel rauque suivi d’une plainte ; puis l’un des cygnes, le mâle sans doute, s’enlève et fuit en fouettant l’eau, tandis que la femelle de nouveau immobile et blanche reste au milieu des grands ronds d’argent qui vont, concentriquement élargis, mourir et se briser aux dentelures du rivage.

La causerie tout à l’heure encore languissante sembla reprendre vie à ce spectacle évocateur de visions païennes ; et, comme après mille considérations délicatement esthétiques touchant l’art et la volupté, on en était venu à discuter les interprétations diverses que les peintres, que les sculpteurs ont données du mythe de Jupiter et de Léda, René Sévéran, le beau René, dit, se parlant à lui-même :

— « Évidemment, Lazarus avait raison ! »

Sur quoi il alluma un nouveau cigare, ce qui était sa manière à lui de demander la parole ; et, lorsque la fumée se dégagea bien transparente, lorsqu’un dé de cendre net et dessiné comme au pinceau, sans irrégularité ni bavure, parut garantir à ses goûts raffinés de fumeur un plaisir pur qu’aucun accident ne menaçait