Page:Arétin - La Puttana errante, 1776.djvu/29

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chambre seul, et sa femme étoit à la campagne, je courus au trou, et je vis encore nouvelles merveilles. Le cousin étoit sur son lit, étendu, tenant son membre roide à la main : cette posture me réjouit et me donna de la compassion en même tems. Je disois en moi même : Le voilà seul, le pauvret, sans femme comme je suis sans homme ; ne seroit-ce pas bienfait de nous unir pour sortir de l’inquiétude ou nous sommes ? Mais comment faire ? Je m’avisai à la fin de prendre le prétexte de l’aller trouver pour lui demander des nouvelles de son ami et comme il se portoit de sa fièvre. Il ne bougea point de dessus son lit quand j’entrai ; seulement il se couvrit ; et moi je m’étois découvert la gorge, afin qu’il pût voir mes tettons qui lui plaisoient, à ce qu’il m’avait dit souvent. D’abord, il me pria à approcher, et me prenant une main, il me regarda languissamment, il me dit que la maladie de son ami était fort dangereuse. Mais ne parlons pas de cela, ajouta-t-il, dites-moi seulement si vous ne voudriez pas être femme d’un homme qui vous aimerait de tout son cœur. Je lui répondis que j’avois ouï dire qu’une femme étoit heureuse quand elle possédoit le cœur d’un homme. Eh bien, poursuivit-il, en me serrant toujours la main et regardant ma gorge, ne seriez-vous pas bien aise que je fusse cet homme et que vous fussiez la femme ? — Vraiment, lui dis je en souriant, ce n’est pas à un homme marié comme vous à me proposer cela. — Pourquoi non ? me répartit-il ; croyez-vous qu’un homme marié ne puisse pas avoir une amie qu’il aime de