Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 1.djvu/591

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quelque sorte, personnifiés : ces crimes, c’est Robespierre !

De jeunes, d’estimables écrivains, qui dépouillent aujourd’hui nos annales révolutionnaires avec l’infatigable patience des anciens Bénédictins, croient avoir trouvé que l’opinion publique s’est égarée. D’après eux, Robespierre et ses séides auraient beaucoup moins contribué aux actes sanguinaires de la terreur que les Billaud-Varennes, les Collot d’Herbois, les Hébert. Il y a du courage, Messieurs, à se porter ainsi les défenseurs d’un personnage qui depuis près d’un demi-siècle est devenu le type, le symbole de la cruauté politique. À ce seul titre, les nouveaux historiens pourraient espérer d’être écoutés sans préventions : un honorable caractère uni à un incontestable talent ne leur donne pas moins de droits à la sérieuse attention du public. Pour moi, je n’aurais que faire d’essayer ici de percer ces épais nuages ; mon sujet ne l’exige pas : je veux absoudre Carnot de toute participation à de grands crimes, sans examiner s’il faut les imputer à Collot d’Herbois, à Billaud-Varennes, plutôt qu’à Robespierre, Saint-Just et Couthon.

Dans aucune circonstance de sa longue carrière politique, Carnot ne fut un homme de parti. Jamais on ne le vit essayer de faire prévaloir ses opinions, ses systèmes, ses principes, par des voies tortueuses que l’honneur, que la justice, que la probité, n’eussent point avouées.

Rapporteur, le 9 juin 1792, de la commission chargée de proposer des réparations en faveur des familles de Théobald Dillon et de Berthois, massacrés devant Lille par leurs propres troupes, Carnot ne transige pas avec un