Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/218

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œuvre sublime. Suivant lui (je rapporte les propos, quoique dans cette enceinte on ne doive pas les trouver polis) ; suivant Chabot, il fallait être académicien pour ne pas l’accueillir avec enthousiasme. La critique lui semblait une action infâme, que des scélérats pouvaient seuls se permettre. Après toutes ces aménités, Chabot ajoutait ingénument : « Condorcet prétend que sa Constitution est meilleure que la vôtre ; que les assemblées primaires doivent l’accepter : je propose donc qu’il soit mis en état d’arrestation et traduit à la barre, »

L’Assemblée décréta, sans autre information, que l’illustre député de l’Aisne serait arrêté, et qu’on apposerait les scellés sur ses papiers.

Condorcet, quoiqu’on le considérât généralement, mais à tort, comme girondin, ne figurait pas au nombre des vingt-deux députés dont le 31 mai amena l’arrestation. Le 3 octobre 1773, son nom se trouva cependant avec ceux de Brissot, de Vergniaud, de Gensonné, de Valazé, dans la liste des conventionnels traduits devant le tribunal révolutionnaire, accusés de conspiration contre l’unité de la république, et condamnés à mort.

Condorcet, contumace, fut mis hors la loi, et inscrit sur la liste des émigrés. On confisqua ses biens.

L’honneur s’était réfugié dans les camps ! C’est ainsi que des historiens prétendent caractériser les terribles années 1793 et 1794 de notre révolution. On ne parvient à apprécier en si peu de mots de grandes époques historiques qu’aux dépens de la vérité.

Oui, les armées de la république montrèrent un dévouement, une patience, un courage admirables ; oui, des