Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/348

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était déjà fortement engagée le jour où Bailly et les autres députés de Paris purent se rendre, pour la première fois, à Versailles ; notre confrère n’avait encore pris la parole dans cette majestueuse assemblée que pour faire adopter le mode de voter par assis et levé, lorsque, le 3 juin, il fut nommé doyen des députés des communes. Jadis, le droit de présider le Tiers-État du royaume appartenait au prévôt des marchands. Bailly, dans sa modestie, imagina que l’assemblée, en lui décernant le fauteuil, avait voulu dédommager la capitale de la perte d’un antique privilége. Cette considération le décida à accepter une fonction qu’il croyait au-dessus de ses forces, lui qui toujours se dépeignit comme timide à l’excès, et sans facilité pour parler.

Les esprits étaient plus animés, plus ardents en 1789 que ne consentiraient à l’admettre ceux qui voient toujours dans le présent une image fidèle du passé. La calomnie, cette arme meurtrière des partis politiques, ne respectait déjà aucune position. Le savoir, la loyauté, la vertu, ne mettaient personne à l’abri de ses traits empoisonnés. Bailly en fit l’expérience dès le lendemain de sa nomination au poste si éminent de président des Communes.

Les Communes avaient voté, le 29 mai, une adresse au roi sur les difficultés, sans cesse renaissantes, que l’ordre de la noblesse opposait à la réunion des États-Généraux en une seule assemblée. En exécution de la délibération la plus solennelle, Bailly sollicita une audience où l’expression modérée, respectueuse des inquiétudes de six cents députés loyaux, devait être présentée au mo-