Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/563

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

gloire n’est pas toujours dans le succès. N’a-t-on pas vu des canons habilement pointés par des hommes d’une bravoure équivoque décider souvent du gain d’une bataille, de la réussite d’un assaut, de la perte ou de la conservation d’une forteresse ?

« L’action du capitaine de la 85e demi-brigade, que chacun s’empressa de me communiquer à l’instant même où l’armée venait d’en être témoin, partait d’un sentiment qui serait resté sublime, comme le dévouement des Spartiates aux Thermopyles, même au milieu d’une défaite. Cette action produisit dans ma santé la plus heureuse révolution ; je jouissais d’avance du plaisir que je trouverais à la retracer devant tous ceux qui me parleraient de la levée du siége. »

Monge circonscrivait beaucoup trop, par ces dernières paroles, les occasions où il raconterait l’événement qui l’avait tant ému. Sous la domination permanente de son imagination vive et patriotique, ces occasions se reproduisaient sans cesse, et je crois, en vérité, obéir à une injonction de mon illustre maître en essayant, autant qu’il est en moi, de sauver de l’oubli ce que ces récits renouvelés avaient si fortement gravé dans notre mémoire :

Un capitaine de la 85e demi-brigade reçut l’ordre de monter à l’assaut d’une tour dont la partie saillante seulement avait cédé à l’explosion d’une mine. Il commandait quatre-vingts hommes d’élite. Vingt-cinq de ces intrépides soldats prirent position dans le fossé, afin d’empêcher que leurs camarades, gravissant la brèche, fussent attaqués en flanc. Ceux-ci, après bien des efforts, arrivèrent au sommet des décombres. Le capitaine y