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voyage autour du monde.

Je sortis de la chapelle royale comme on sort d’un bal.

L’Espagne et le Portugal sont frères pour les cérémonies religieuses ; il y a chez les deux nations un mélange de dévotion et de fanatisme, le même culte fervent pour des niaiseries, une même confiance dans quiconque est revêtu de l’habit de prêtre, de quêteur, de moine, de capucin, de pèlerin ou de chartreux. Si l’histoire n’était pas là pour l’instruction des peuples, on croirait qu’à Madrid, à Lisbonne et à Rio surtout, la religion a ses plus dignes apôtres, la foi, ses plus intrépides défenseurs. Je vois là, au pied du maître-autel de cette magnifique chapelle royale, une trentaine de prêtres tout couverts d’or, de soie et de dentelles ; ils s’agenouillent à un signal convenu, ils baisent la terre périodiquement de leur lèvres rosées, l’église retentit des coups de poing dont ils se frappent la poitrine… Maintenant, voyez-les dans la rue, courant et papillonnant comme s’ils étaient las du rôle qu’ils viennent de jouer, comme s’ils voulaient se venger de la retenue qui leur a été imposée !

Au Brésil, un moine ou un prêtre a toujours dix-huit ans.