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vii
notes scientifiques.

à l’aide de la boussole, que les directions des objets renversés convergeaient généralement, dans chaque région, vers un point central.

La théorie de M. Espy est complètement en désaccord avec celle que M. le colonel Capper, de la Compagnie des Indes, proposa en 1801 ; que M. Redfild, de New-York, a reproduite naguère en la perfectionnant, et qui vient d’être l’objet d’un mémoire approfondi présenté à association britannique, à New-Castle, par le lieutenant-colonel Reid.

D’après cette théorie, les grands ouragans des Antilles, des régions tropicales et de la côte orientale des États-Unis, seraient d’immenses trombes. M. Reid trouve que les directions simultanées des vents dans les vastes étendues de pays que les ouragans ravagent concordent avec son hypothèse. Les journaux nautiques qu’il a pu discuter, provenant des divers navires dont se composait l’escadre de l’amiral Rodney en 1780, et du grand convoi escorté par le Culloden, qui, en 1808, fut presque anéanti dans le voisinage de l’Île-de-France, paraissent aussi montrer que sur la limite extérieure du tornado, les vents, au lieu d’être normaux à un seul et même cercle, lui étaient tangents.

En point de fait, les observations sur lesquelles s’appuient, d’un côté, M. Espy et M. Bache, de l’autre, MM. Redtield et Reid, ne pourraient se concilier qu’en admettant qu’il y a des ouragans, des tornados de plus d’une sorte.

Si l’on suivait la théorie de ces deux derniers météorologistes, il faudrait accorder que la trombe-ouragan a quelquefois une base de sept à huit cents lieues de diamètre ; que sa vitesse de propagation peut aller à huit lieues à l’heure ; que celle de la rotation de l’air à la circonférence, ou, en d’autres termes, que la vitesse des vents tangents, est quelquefois de quarante lieues à l’heure.

L’observation singulière de Franklin, que les vents un peu forts ont quelquefois leur origine dans les points vers lesquels ils soufflent, se rattache parfaitement à la théorie de M. Redfield. Rapportons, en tout cas, l'observation de l'illustre physicien américain.

En 1740 on éprouva à Philadelphie, vers les sept heures du soir, une tempête violente du nord-est, qui ne se fit sentir à Boston que quatre heures plus tard, quoique cette ville soit au nord-est de la précédente. En comparant ensemble plusieurs rapports, d’autant plus exacts que dans cette même soirée, on avait observé une éclipse de lune dans un grand nombre de stations, on reconnut que l’ouragan, qui partout soufflait du nord-ouest, s’avançait du sud-est vers le nord-est avec ure vitesse de seize myriamètres par heure.

Une tempête semblable du nord-est fut observée de nouveau sur cette côte de l’Amérique, en 1802 ; elle commença à Charlestown, à deux heures après midi, et ne se fit sentir à Washington qu’à cinq heures ; à New-York, qui est plus septentrional que ces deux premières villes, elle commença à dix heures du soir, et n’atteignit Albani qu’au point du jour du lendemain. Dans tout cet intervalle, la vitesse par heure fut d’environ seize myriamètres.

J’imagine qu’on ne sera pas fâché de trouver ici les vitesses, déterminées par les physiciens, des diverses sortes de vents


Vitesse par seconde. Vitesse par heure.
00m,05 1,800m vent à peine sensible.
01m,00 3,600m vent sensible.
02m,00 7,200m vent modéré.
05m,05 19,800m vent assez fort.
10m,00 36,000m vent fort.