Page:Arago - Souvenirs d’un aveugle, nouv. éd.1840, t.1.djvu/263

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
205
VOYAGE AUTOUR DU MONDE.

La première nuit de notre départ fut une nuit d’émotions et de travail ; car, après avoir plusieurs fois talonné dans la baie, nous nous vîmes arrêtés tout à coup et forcés d’aller mouiller des ancres pour nous remettre à flot. Au point du jour nous reprîmes notre route, et tant que la côte fut en vue, elle se dessina avec ses étroites zones tranchées de craie blanche et de cinabre, pelée, morne, silencieuse, menaçante. M. Duperrey, un des officiers les plus instruits de notre marine, avait déjà puisé, dans une course périlleuse le long de la terre et à travers mille difficultés, des documents précieux, et tracé une excellente carte des criques et des anses où les navires peuvent s’assurer un mouillage à côté de ce sol inhospitalier.

Nous longeâmes de nouveau la terre d’Edels, que nous avions saluée à notre arrivée et dont le morne aspect glace le cœur. Nous côtoyâmes l’île d’Irck-Hatighs jusqu’au cap de Lovillain, et nous laissâmes à notre droite les îles de Dorre et de Bernier, où se trouvent en famille assez nombreuses les kanguroos à bandes longitudinales, si jolis, si coquets, si lestes.