Page:Arago - Souvenirs d’un aveugle, nouv. éd.1840, t.1.djvu/515

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

XXXVII

ÎLES MARIANNES

Histoire générale. — Résumé.

Il n’y a pas d’extravagances et de sottises que n’aient écrites les historiens espagnols, qui les premiers ont fait connaître à l’Europe les Mariannes et leurs habitants ; ils ont prétendu que ceux-ci ne marchaient qu’à reculons, que la plupart se tenaient courbés comme les quadrupèdes, sans que pourtant les bras touchassent à terre, et ils ont ajouté que le feu était resté pendant des siècles ignoré de tout l’archipel.

La nature et la structure de l’homme donnent un démenti aux premières assertions ; et, quant à la dernière, les orages qui pèsent en certaines saisons sur les climats équatoriaux, et plus encore les volcans dont presque toutes les îles Mariannes sont couronnées, disent ce qu’elle a d’absurde et de fabuleux. Mais ce qui paraît avéré, ce qui semble victorieusement démontré, quoique les historiens de la conquête l’aient dit avant nous, c’est que les femmes d’alors avaient dans toutes les occasions la prééminence sur les hommes, qu’elles présidaient à toutes les délibérations publiques, et que le code de tous avait été créé par elles seules.

La domination espagnole, en écrasant de tout son despotisme cet archipel si brillant et si varié, n’a pas eu la force de renverser cet usage tout rationnel (d’après moi), incrusté, pour ainsi dire, dans les mœurs primitives.

La femme, même actuellement, ne prend jamais le nom du mari ; on la sert la première à table, non par galanterie, mais par devoir, par défé-