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Page:Arago - Souvenirs d’un aveugle, nouv. éd.1840, t.2.djvu/106

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SOUVENIRS D’UN AVEUGLE

Les Sandwichiens ont probablement appris que d’autres peuples avaient l’habitude de se peindre le corps, de se tatouer ; ils savent que chez ceux-ci la figure est zigzaguée de rainures et que le reste de l’homme est pur ; que chez ceux-là, c’est le torse qui a reçu l’impression des piqûres, tandis que plus loin, les jambes ou les bras seuls en sont ornés. Eh bien ! eux, les Sandwichiens, ont voulu se différencier ; et, par un privilège d’extravagance inconcevable, les plus coquettes Sandwichiennes se font tatouer la langue !

Encore si ces dessins étaient le résultat d’un travail régulier, exécuté avec le même instrument. Mais point ; ce sont tantôt des égratignures assez profondes, tantôt des piqûres imperceptibles ; ce sont aussi des plaies qui rident et chiffonnent la peau, des brûlures qui lui donnent une teinte livide, de telle sorte qu’on croirait les individus frappés de maladies cutanées. Voilà bien des soins pour gâter une belle œuvre, voilà bien des recherches dépensées au profit de la laideur, voilà une bien ardente imagination en travail pour détruire une harmonie.

Que d’études à faire sur le peuple de cet archipel ! Ajouterai-je que le