Page:Archives curieuses de l’Histoire de France, série 1, tome 7.djvu/211

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Comme je l’ay dit, il y a des huguenots en grand nombre qui sont eschappez de la tuerie, tous lesquels peuvent estre repartis en deux espèces : l’une sera de ceux qui s’en sont fuys hors la France, l’autre de ceux qui y sont demeurez. Ceux qui sont sortis se sont relirez en Suysse, en Allemagne, en Angleterre et ès isles qui luy sont sujettes. À ceux-cy le Roy ne touche que par lettres, messagers et autres menées, taschant (comme bon père de famille qui a soin de ses enfans) de les faire revenir en lieu où il les puisse trouver quand il voudra, pour la pitié qu’il a des disettes et nécessitez qu’ils endurent estant hors de leurs maisons, ès quelles il désire (ce disent ses lettres) qu’ils reviennent, pour pouvoir jouyr de leurs biens, en se conformant à sa volonté et faisant ce qu’il commandera. Ceux qui sont demeurez en France, outre les morts, sont de diverses conditions ; les uns se sont retirez dans des villes fortes, comme vous diriez dans Montauban, Sancerre, Nysmes, La Rochelle, et dans certaines autres villes. Contre ceux-cy, le Roy a envoyé ses frères pour les exterminer, s’il le peut faire, pour ce qu’ils n’ont pas voulu laisser entrer dans les villes où ils sont ceux qui y alloyent pour les tuer de par le Roy, et qu’ils leur ont fermé les portes. Sur toutes les villes il en veut à celle de La Rochelle.

Elle l’a eschappé belle, ceste povre Rochelle ; car j’ose dire pour certain que l’armée de mer de Strossy et du baron de La Garde, qui estoit en Brouage près de La Rochelle, il y avoit plus de quatre mois, pour attendre (ce disoyentils en secret) la flotte d’Espagne et la combattre (comme aussi l’amiral le pensoit), et de là singler à Flessinghe, ne taschoit qu’à surprendre La Rochelle à poinct nommé ; et plus de deux mois avant la tuerie de Paris, la Royne mère avoit envoyé à Strossy une lettre escrite de