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Page:Archives parlementaires de 1787 à 1860, Première Série, Tome IX.djvu/218

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[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 septembre 1789.]

législatif, et seulement pendant le temps qu'il aura fixé ; 5° qu'elles ne pourront être traversées ni arrêtées, dans leurs fonctions administratives, par aucun acte du pouvoir judiciaire.

Établissement des municipalités.

Nous avons vu jusqu'ici que dans chaque commune la représentation nationale pour la législature, et la représentation provinciale pour l'administration générale, tirent leurs éléments des assemblées primaires. Ces deux établissements composent ensemble le grand édifice national. C'est sur la même base, c'est-à-dire sur la même assise des assemblées primaires, qu'il s'agit d'élever un second édifice politique, qui est la constitution municipale.

Commençons par bien fixer quelle est la nature de cette constitution. Le régime municipal, borné exclusivement au soin des affaires particulières, et pour ainsi dire privées de chaque ressort municipalisé, ne peut entrer sous aucun rapport, ni dans le système de la représentation nationale, ni dans celui de l'administration générale. Les communes devant être les premières unités dans l'ordre représentatif qui remonte à la législature, et les dernières dans l'ordre du pouvoir exécutif qui descend et finit à elles, chaque municipalité n'est plus dans l'Etat qu'un tout simple individuel, toujours gouverné ; et ces touts séparés, indépendants les uns des autres, ne pouvant jamais se corporer, ne peuvent être élémentaires d'aucun des pouvoirs gouvernants.

S'il est important de donner à la nation l'énergie et la puissance nécessaires pour défendre sa liberté, et aux municipalités une consistance utile et respectable dans leurs territoires, cette double considération doit vous porter à constituer les 720 grandes communes du royaume, en autant de corps de municipalité.

Vous n'auriez ainsi que sept cent vingt unités pour bases, tant du régime municipal, que de la représentation nationale et de l'administration générale. Vous augmenteriez par là les forces de chaque municipalité en rassemblant à un seul point toutes celles d'un même territoire que leur dispersion actuelle réduit à l'inertie. Au lieu d'atténuer la vigueur nationale en divisant le peuple par petites corporations, dans lesquelles tout sentiment généreux est étouffé par celui de l'impuissance, créez plutôt de grandes agrégations de citoyens unis par des rapports habituels, confiants et forts par cette union ; agrandissez les sphères où se forment les premiers attachements civiques ; et que l'intérêt de communauté, si voisin de l'intérêt individuel, si souple sous l'influence des hommes à crédit, quand ses moyens sont faibles et son objet trop borné, se rapproche davantage de l'esprit public en acquérant plus de puissance et d'élévation.

Si vous agréez cette vue, l'institution des hôtels de ville et des municipalités villageoises, telle que nous la voyons aujourd'hui, devrait être entièrement réformée. La différence de nature et d'objet qui se trouve entre l'administration générale et le régime principal ne permettrait pas, sans doute, de faire reposer ce dernier dans l'assemblée administrative de chaque commune ; mais les assemblées primaires, formées, comme a été dit, pour la représentation, nommeraient des députés pour composer au chef-lieu de la commune une assemblée municipale.

Cette assemblée serait le conseil d'administration, et exercerait une sorte de législature pour le gouvernement du petit État municipal, composé du territoire entier de la commune ; et le pouvoir exécutif, tant pour le maintien des règlements généraux que pour l'expédition des affaires particulières du ressort de la municipalité, serait remis à un maire élu par toutes les assemblées primaires.

Le conseil municipal déciderait, dans toute l'étendue de son ressort, de tout ce qui concerne la police municipale, la sûreté, la salubrité, la régie et l'emploi des revenus municipaux, les dépenses locales, la petite voirie des rues, les projets d'embellissements, etc. Cette autorité du conseil s'étendrait ainsi non-seulement aux choses communes au district entier, mais encore aux choses particulières à chaque ville, bourg ou paroisse, qui lui adresserait ses requêtes ou pétitions. Les villes et les paroisses de campagne auraient chacune une agence sous le titre de bureau municipal, qui veillerait à leurs intérêts locaux, et correspondrait pour leurs besoins avec le conseil de la municipalité commune. Enfin, le maire, chef du pouvoir exécutif municipal, comptable et responsable de ses fonctions au conseil, en ferait exécuter les arrêtés et les décisions par les bureaux municipaux qui lui seraient subordonnés.

Il résulterait de ce régime des municipalités une foule d'avantages dont elles n'ont pas paru susceptibles jusqu'ici. La faiblesse de celles qui subsistent maintenant, excepté dans quelques grandes villes, les expose à être aisément séduites par l'intrigue, ou subjuguées par l'autorité : de là la dissipation des deniers communs, les entreprises inconsidérées, les dettes élevées au dessus des moyens, et tant de délibérations inspirées par l'esprit particulier à la ruine de l'intérêt général. Combien de municipalités dans les campagnes ne sont pas à la merci des seigneurs, ou des curés, ou de quelques notables ! Combien, dans les petites villes, ne sont pas dominées par le crédit des principaux citadins! N'attendons rien de ces administrations trop faibles pour se conserver indépendantes ; l'unique moyen d'émanciper l'autorité municipale est de la distribuer en plus grandes masses, et de rendre les corps qui en seront dépositaires plus éclairés et plus puissants, en les rendant moins nombreux. Alors ils pourraient devenir utiles, sous une infinité d'autres rapports publics, soit pour la police, soit pour l'administration de l'impôt, soit pour l'inspection et l'emploi de la garde nationale, et milice intérieure, puisqu'elles offrirait en chaque district d'une certaine étendue des centres de pouvoir unique et de régime uniforme.

Les agences ou bureaux de municipalité nécessaires en chaque ville ou paroisse seraient composés dans les villes, de quatre membres, lorsque la population serait de 4,000 âmes et au-dessous ; de six membres, depuis 4,000 âmes jusqu'à 20,000 ; de huit membres, depuis 20,000 âmes jusqu'à 50,000 ; de dix membres, depuis 50,000 âmes jusqu'à 100,000 ; et de douze membres au-dessus de 100,000 âmes. Ils pourraient être composés dans les campagnes de quatre membres, y compris le syndic, dans les paroisses de 150 feux ; de six membres, y compris le syndic, dans celles depuis 150 feux jusqu'à 300 ; et de huit membres y compris le syndic, au-dessus de 300 feux.

Pour élire les membres des bureaux municipaux, tous les citoyens actifs se réuniront dans les villes en assemblées primaires, et, dans les campagnes en assemblée générale de paroisse.

Tous les deux ans, les bureaux de municipalité seraient régénérés par moitié : la première