Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 1.djvu/300

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qui avait suivi celui du 1er février, leur départ de Brest avait été ajourné par un autre décret du 29 août ; et ils ne quittèrent la France que pour venir concourir à l’exécution de celui du 24 septembre. Leur mission avait donc changé de nature par cette nouvelle résolution de la métropole. Ayant peu de troupes avec eux, chargés de rétablir l’ordre, la paix et la tranquillité publique, il leur fallait un désir bien sincère de remplir une telle mission pour la continuer, puisqu’ils allaient se trouver nécessairement placés sous la dépendance de l’assemblée coloniale à laquelle était déféré le droit de statuer sur le régime intérieur de la colonie, tandis que primitivement ils étaient chargés de notifier à ces despotes des dispositions propres à se concilier la classe des hommes de couleur et à se donner une grande force morale.

En arrivant, le premier spectacle qui s’offrit à leurs regards étonnés fut celui des deux roues et des cinq potences dressées au Cap, où l’on voyait toujours exposés des cadavres de nègres et de mulâtres, depuis le commencement de l’insurrection. Ils apprirent tous les événemens survenus dans la colonie et dont on n’avait pu avoir connaissance en France avant leur départ. D’un côté, le soulèvement des esclaves dans le Nord, ayant pour auxiliaires beaucoup d’hommes de couleur, la guerre affreuse qui en était résultée ; de l’autre, la prise d’armes des affranchis dans l’Ouest et dans le Sud, la guerre qui s’en était suivie et les concordats passés entre cette classe d’hommes et les blancs de ces deux provinces.

Fatalement voués à l’impuissance du bien, ces commissaires ne pouvaient qu’user de conseils auprès de